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[EXPO] Relations Pères-Filles au Sénégal : Témoignages intimes en Photos et Vidéos

Crédit photo : Dakartnews

Dans la salle circulaire du Musée de la Femme de Dakar Henriette Bathily, une série de portraits photos de pères et de filles prend place, formant un cercle captivant. Certains visages semblent incomplets, comme s’ils attendaient l’autre moitié pour former un tout. Des box entourent également l’espace, créant une atmosphère immersive. À l’entrée de chaque petite boîte, des rideaux de pagnes aux motifs africains invitent les visiteurs à découvrir un espace d’intimité.

À l’intérieur, un écran de télévision diffuse des vidéos captivantes tandis que les murs sont ornés de photos en noir et blanc des duos père-fille. Les visiteurs et visiteuses sont encouragé.es à s’immerger dans ces récits personnels en mettant un casque pour écouter les histoires touchantes des participants.

Les témoignages (au nombre de 11 familles et 1 sociologue) proviennent de femmes issues du monde sportif et de l’entreprenariat, ajoutant ainsi une diversité d’expériences et de perspectives.

Khadija Sy et son père Makha Sy. Crédit photo: Dakartnews.

Chaque histoire est titrée pour en résumer l’essence, comme “Amour”, qui narre le parcours de Khadija Sy, 33 ans, et son père Makha Sy. Dans le récit de Khadija Sy, qui dure près de 9 minutes, son parcours prend une dimension particulière. Khadija, porteuse de trisomie 21, a dû faire face à des défis uniques. Mais elle a eu la chance de pouvoir compter sur le soutien inébranlable de son père, pour qui sa venue a été perçue comme « un cadeau du ciel ».

Grâce à cette solide relation paternelle, elle a pu poursuivre son rêve et remporter plusieurs médailles dans des compétitions internationales, notamment au sein de l’organisation Special Olympics, la plus grande organisation sportive au monde pour les enfants et les adultes en situation de handicap intellectuel.

En parallèle, les initiateurs du projet Père(s) Fille(s) mettent en lumière la “complicité” entre d’autres duos, comme celle entre Alioune Elimane Bâ et sa fille Ndeye Marieme Bâ, 47 ans, coach et championne de basketball à trois reprises en Afrique.

Alioune Elimane Bâ et Ndeye Marieme Bâ.

« Mon rôle modèle c’est mon papa. C’est lui qui a toujours été à mes côtés pour m’encourager, me motiver et ce jusqu’à aujourd’hui. Mon père est le papa poule qui aime beaucoup ses enfants et qui est proche de ses enfants », partage Ndeye Marieme Bâ dans un extrait vidéo.

Et son père de répondre avec tendresse : « Quand elle était jeune, elle était très intelligente et attachante. Elle a repris ma passion pour le sport et c’était tout un plaisir pour moi ».

Rokhaya Faye, médiatrice culturelle, souligne l’originalité de l’exposition : “Ici au Sénégal, on est plus concentré sur les relations entre mère-fille et mère-fils dans la plupart de nos familles. Or cette expo met en valeur l’aspect avec les pères. C’est aussi un plaisir pour nous de voir les gens qui viennent et qui aiment le concept.”

Par ailleurs, l’expérience des récits personnels de ces femmes suscite un impact émotionnel qui ne laisse personne indifférent lorsqu’on les écoute, les lit ou les regarde.

Kiné, designer et créatrice d’une marque de vêtements, en est un exemple poignant. Issue d’une famille nombreuse marquée par le divorce de ses parents, elle a rarement eu l’occasion de passer du temps avec son père.

Cette absence parentale a causé chez elle une profonde frustration dès son plus jeune âge. Après avoir déménagé en France avec son mari français, une occasion inattendue s’est présentée : son père est venu en Europe pour une opération des yeux et a souhaité la rencontrer.

Cette rencontre a permis à Kiné, alors dans la vingtaine, de construire une nouvelle relation avec son géniteur, loin du contexte familial sénégalais. Une expérience qui a transformé leur relation en quelque chose de positif et enrichissant.

Masculinité positive “

Marina Gning est la réalisatrice des vidéos. Cette française, mariée avec un sénégalais depuis plus de 20 ans, souhaite à travers cette exposition, valoriser la masculinité positive :

« Mon idée de départ était de montrer des modèles de supers papas sénégalais pour inspirer les jeunes générations. Souvent on met en valeur les mamans mais on ne le fait pas suffisamment pour les papas. Les papas sont plus souvent vus comme pourvoyeurs de ressources financières ou figures d’autorité. Et moi je voulais montrer qu’un papa peut changer la vie des filles lorsqu’il leur ouvre des portes. »

Au Sénégal, les femmes restent désavantagées par rapport aux hommes dans de nombreux domaines, et les inégalités persistent. Cette réalité soulève des questions sur la nécessité et l’opportunité de mettre en place une exposition pour valoriser les hommes dans un tel contexte.

« On critique beaucoup les hommes, souvent à raison, mais aujourd’hui il faut qu’on passe à autre chose», estime-t-elle.

On critique le modèle patriarcal, on travaille beaucoup sur l’empowerment des femmes. Certes, c’est vrai tout cela, mais à un moment donné, il faudrait qu’on construise ensemble. C’est un concept qui part de la masculinité positive. L’objectif est de mettre en avant les super papas, ceux qui prennent leur rôle au sérieux et qui soutiennent leurs filles. Il ne s’agit pas de valoriser les hommes en général. Je veux passer de la critique à la proposition », se défend Marina Gning.

Cette exposition offre une réflexion profonde sur la dynamique entre les genres et les rôles familiaux, en mettant en lumière les histoires de femmes qui ont transcendé les normes de genre pour exceller dans des domaines souvent réservés aux hommes. En explorant leurs relations avec leurs pères, l’exposition souligne l’importance des figures paternelles dans l’émancipation et l’autonomisation des femmes, tout en remettant en question les stéréotypes de genre prédominants dans les sociétés patriarcales.

Père(s)-Fille(s), réalisée en coopération avec le projet régional « Sport pour le Développement en Afrique » (S4DA) de la GIZ, se veut en définitive une source d’inspiration pour les hommes. Les photographies ont été réalisées par Jim Sohm et la scénographie par Nunu Design.

Le souhait de la réalisatrice est de faire voyager l’exposition, surtout auprès de la diaspora et de développer des podcasts pour transmettre en longueur les témoignages reçus. Initialement prévue jusqu’au 8 mai 2024, elle a été prolongée jusqu’au 30 juin 2024.


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